"Irréductiblement imprévisible"

Le climat est un système tellement vaste et complexe qu'il génère beaucoup de "bruit" et qu'il est difficile de distinguer les modèles et les tendances. En développant des modèles plus précis pour Canada1Water, Andre Erler , climatologue principal, et ses collègues espèrent apporter une nouvelle clarté à l'image du climat canadien - et résoudre certaines énigmes persistantes.

Andre Erler est chercheur principal en climatologie à Aquanty et responsable du climat dans le cadre du projet Canada1Water, où il coordonne toutes les activités liées au climat, à la neige et au pergélisol.

De nombreux schémas climatiques sont parfaitement évidents. Le changement annuel des saisons est suffisamment régulier pour qu'il soit souvent difficile de louer un chalet même six mois avant le mois de juillet, et les baies des garagistes s'encombrent de façon prévisible de rendez-vous pour les pneus neige à la fin de l'automne.

Mais d'autres cycles peuvent avoir des périodes beaucoup plus longues - 10 ans, 15 ans, 50 ans ou plus.

"Souvent, nous ne disposons pas de suffisamment de données pour identifier ces modèles à long terme", explique Erler. "Il est difficile d'identifier une période de 50 ans si les observations enregistrées ne remontent qu'à 100 ans.

Au-delà de l'échelle de temps, de nombreux phénomènes liés au climat sont également variables ou irréguliers. El Niño, par exemple, se produit parfois une fois tous les deux ans, mais peut aussi se produire tous les sept ans ou plus. L'oscillation décennale du Pacifique (ODP), qui influe sur les températures de l'océan Pacifique et a un impact marqué sur les conditions météorologiques dans les Prairies canadiennes, semble avoir une période d'environ 15 ans, bien qu'elle puisse également avoir une période secondaire de 50 ans.

L'ajout de ce type de variabilité à un climat déjà incertain peut rendre difficile l'élaboration de modèles fiables à long terme. Pourtant, des modèles fiables sont précisément ce que de nombreuses personnes souhaitent, en particulier dans des régions telles que les Prairies canadiennes.

Les Prairies deviennent-elles plus sèches ?

Les récentes périodes de sécheresse font craindre à certains que les Prairies subissent un changement climatique irréversible, et certains modèles suggèrent que les étés des Prairies deviendront progressivement plus secs tout au long de ce siècle. Mais ont-ils raison ? Étant donné le rôle crucial des Prairies dans l'agriculture et la sécurité alimentaire du Canada, la réponse est importante.

"Selon de nombreux modèles climatiques mondiaux, les Prairies sont généralement trop sèches en été et trop humides en hiver", explique M. Erler. "Ces généralisations sous-estiment la véritable variabilité du cycle saisonnier. En fait, les Prairies ont tendance à recevoir la plupart de leurs précipitations en été pour un certain nombre de raisons, notamment parce que la région est située dans l'ombre pluviométrique des montagnes Rocheuses".

En donnant une meilleure représentation de la résolution climatique des Prairies - y compris les montagnes, les interactions entre la surface terrestre et les impacts hydrologiques sur l'atmosphère - Canada1Water contribuera à clarifier les schémas climatiques de la région et à fournir des perspectives climatiques plus précises jusqu'à la fin du siècle.

Une question de probabilités

Au fil du temps, il est concevable que le changement climatique ait un impact sur la variabilité du climat, bien que l'on ne sache pas exactement comment.

"Les précipitations extrêmes pourraient devenir plus intenses mais plus courtes - en d'autres termes, plus variables - tandis que les températures pourraient devenir moins variables en raison des effets régulateurs de l'humidité", explique M. Erler. "Mais il n'y a vraiment aucun moyen de l'affirmer avec certitude à ce stade.

Bien que Canada1Water modélise les tendances et les modèles à long terme jusqu'à la fin du siècle, la variabilité et l'imprévisibilité du climat ne permettent pas de prévoir des événements spécifiques tels qu'une crue soudaine un jour donné en 2080.

"Nous ne pouvons étudier les probabilités que dans le cadre de simulations, car le climat est fondamentalement aléatoire", explique M. Erler. "C'est la raison pour laquelle on ne peut prédire le temps qu'à quelques semaines d'intervalle. Même les perturbations quantiques affectent le macrosystème - c'est ce qu'on appelle l'effet papillon. À une certaine échelle, l'imprévisibilité est irréductible". 

"Selon denombreux modèles climatiques mondiaux, les Prairies sont généralement trop sèches en été et trop humides en hiver. Ces généralisations sous-estiment la véritable variabilité du cycle saisonnier".
- Dr. Andre Erler
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